En résidence de création
Vie de garçon
Noah Truong
Le projet d’écriture
En résidence à La Marelle, Noah Truong poursuit l’écriture de Vie de garçon, un texte poétique, d’inspiration autobiographique, rédigé à la première personne et dans lequel aucun accord grammatical de genre n’apparaît.
Il ne s’agit pas de raconter la souffrance de l’enfant trans dans son corps, mais au contraire de célébrer la fluidité des limites du corps, qui n’est pas juste chair et os, mais projection, pensée, fantasme, désir. Le fait d’exclure tout accord grammatical de genre, tout en écrivant directement sur le genre comme sujet, constitue en tant que tel un défi et un enjeu littéraire : dans le texte sont mis en évidence, et déjoués, des stéréotypes de genre, de façon que le genre de l’énonciation demeure perpétuellement troublé.
Note d’intention de l’auteur
Avant d’être un homme trans, j’ai été un enfant trans. C’est-à-dire une petite « fille » qui a cherché, par tous les moyens à ma disposition, à enrober le corps que j’avais, et dans lequel je ne me reconnaissais pas, d’un autre corps, masculin, qui serait le mien.
Je ne pouvais pas communiquer ce désir, ni à des adultes ni à d’autres enfants, parce que j’avais peur.
Je ne pouvais pas changer véritablement mon corps.
Ma seule possibilité, l’unique domaine de mon pouvoir, c’était celui de l’imagination.
J’avais un corps de « fille », mais je pouvais rêver debout, éveillé, dans mon lit, à l’école, dans la cour, que j’étais - rayez la mention inutile - un prince, un sultan, un mousquetaire, un croisé, un pirate, un Peter Pan, un Robin des Bois, un super héros comme Batman ou Spiderman, un jeune héritier, un soldat, un épicier, un vendeur d’allumettes, un mendiant, ou un père de famille, ou un fils.
N’importe qui, tant que c’était au masculin.
Il me suffisait d’habiter entièrement dans cet espace liminaire entre la réalité et le rêve qu’est le jeu.
Noah Truong
À écouter…
La première chose que je peux vous dire…
Extrait
Parce qu’un jour j’ai poussé un garçon de dix ans dans la cour j’ai la certitude d’avoir plus de force que la moyenne
Je fantasme cette force dans les muscles de mes bras et de mes cuisses en courant
Je crois la percevoir dans mon ventre quand je saute et que j’escalade
Chaque défi d’arbre à grimper, de saut à assurer ou de lancer de balle la met en jeu et chaque succès la vérifie
J’en augure des symptômes, chaleur, palpitation et souffle court puis me démène pour les trahir
Même au repos je crois qu’émane de moi le charisme tranquille des athlètes dont la puissance peut à tout moment ressurgir
Le lieu de résidence
La résidence de Noah Truong a lieu à la Villa des auteurs, dans le logement de résidence à la Friche la Belle de Mai.
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